La startup française Flying Whales souhaite révolutionner le secteur du transport de fret en remettant les ballons dirigeables au goût du jour. Avec un premier vol inaugural prévu début 2026, l’entreprise a tout le potentiel pour devenir un leader mondial du transport aérien durable.
Créée en 2012 par Sébastien Bougon, Flying Whales travaille toujours sur son programme LCA60T, un dirigeable rigide pour le transport de charges lourdes dans les zones isolées. Ces ballons devraient être capables de transporter jusqu’à 60 tonnes sur de longues distances, et en particulier dans des zones éloignées ou difficiles d’accès.
Pourquoi un ballon dirigeable ?
Ces cargos volants peuvent livrer leurs charges sans avoir à se poser, et ont pour but de simplifier le transport de marchandises lourdes et volumineuses, telles que les pièces d'aéronefs, les équipements industriels ou les matériaux de construction, mais aussi la livraison de fret humanitaire.
Le projet est né avec l’Office National des Forêts (ONF), qui voyait dans le dirigeable une réponse aux problématiques d’accès à certaines ressources naturelles sous-exploitées, situées dans des parties du territoire français difficilement accessibles par camion (Alpes, Corse, Guyane notamment).
Le secteur éolien intéresse également Flying Whales, en mesure de transporter les pales sur les sites les plus difficiles d’accès. Un accord pourrait également voir le jour avec le CNES et Arianespace pour transporter le matériel spatial en Guyane, précise Romain Schalck pour 20 Minutes, directeur de la communication de Flying Whales.
Plus léger que l’air, d’une longueur de 200 mètres pour une largeur de 50 mètres, le dirigeable LCA60T demande 180 000 m3 d’hélium pour se soulever sans effort avec ses 60 tonnes de charge utile. Économe en énergie et en émissions de CO2, son système de propulsion hybride sans empreinte au sol en fait un mode de transport durable, 15 fois moins émetteur de CO2 qu’un hélicoptère de transport.
Flying Whales soutenue par l’État français et un consortium de l’aéronautique
En 2022, Flying Whales finalisait une importante et dernière levée de fonds de 122 millions d'euros. Une opération soutenue par l'Etat français à travers French Tech Souveraineté, dans le cadre de France 2030 piloté par le Secrétariat général pour l'investissement et opéré par Bpifrance, ainsi que par la Principauté de Monaco via la Société Nationale de Financement. Le gouvernement du Québec, déjà actionnaire à hauteur de 25 % via Investissement Québec, avait également renforcé sa participation dans ce nouveau tour de table.
Le consortium industriel de Flying Whales comprend une quarantaine d'entreprises aéronautiques françaises et canadiennes. Parmi ses investisseurs notables figurent ALIAD (le fonds de capital risque d’Air Liquide), ADP Group, la Société Générale Assurances, JP Morgan et plusieurs investisseurs privés. Le projet, soutenu par les gouvernements français et québécois depuis 2017, bénéficie également de l'appui de plusieurs régions françaises, notamment la Nouvelle Aquitaine, actionnaire de l'entreprise et site du futur établissement de production en France.
Un projet d’usine en Gironde
La startup a jeté son dévolu sur la commune de Laruscade en Gironde pour construire son usine géante de dirigeables. Le projet est estimé à 100 millions d'euros, mais rencontre actuellement quelques défiances de la part de l'Autorité Environnementale, une émanation du ministère de la Transition Écologique.
La construction du site entraînerait en effet la destruction significative de l'écosystème local. Située au cœur d'un massif forestier et à proximité de deux zones Natura 2000 abritant des espèces protégées, l'implantation de l'usine soulève des préoccupations environnementales importantes.
Malgré ces inquiétudes, un déplacement du site de l'usine est exclu par l'entreprise. Clément Barthe, directeur industriel de Flying Whales, affirme pour France Bleu l'absence d'alternatives viables, précisant que treize collectivités en Gironde ont été consultées sans trouver de site approprié. Tout en reconnaissant l'impact environnemental de son projet, Flying Whales s'engage à minimiser autant que possible ces effets. Alain Rousset, président de la région Nouvelle-Aquitaine, soutient également l’usine pour son potentiel écologique de transport bas-carbone et de réindustrialisation de la commune.
Un calendrier à horizon 2027
Le vol inaugural du premier dirigeable était à l’origine prévu en 2025, si la construction de l’usine avait démarré en janvier 2024. Dans un entretien accordé à 20 Minutes, Romain Schalck annonce 5 à 6 mois de retard sur le calendrier, en raison des aléas liés à l’usine de Laruscade : ”On comptait démarrer la construction de l’usine au premier semestre 2024, pour le vol inaugural de notre premier dirigeable fin 2025-début 2026, et le premier vol commercial courant 2027. On risque d’annoncer cinq à six mois de retard par rapport à ce calendrier.”
En attendant, Flying Whales poursuit le développement des sous-ensembles de ses ballons et envisage deux autres sites de production, au Québec pour le marché américain et en Australie pour la zone pacifique. L’entreprise a l’ambition de construire 160 machines au cours des dix premières années sur l’ensemble de ces trois sites.
Le business plan de Flying Whales intègre une stratégie de croissance couvrant à la fois le volet industriel et opérationnel, avec la création de deux branches distinctes : Flying Whales Industry, dédiée au développement et à la production du dirigeable, et Flying Whales Services, axée sur la gestion opérationnelle de la solution de transport. Le coût total du projet est estimé à environ 500 millions d’euros.