Vela, concepteur et armateur de voiliers cargos pour un transport maritime décarboné, vient de lever 40 millions d'euros. Ce tour de table financera la construction de son premier trimaran, prévu pour 2026, et le développement d'une flotte capable d'assurer 5 traversées de l'Atlantique par semaine d'ici 3 à 4 ans.
Une alternative décarbonée au fret maritime conventionnel
Fondée en 2022 à Bayonne par Michaël Fernandez-Ferri, Pascal Galacteros, Thibault Charles, Pierre-Arnaud Vallon et le navigateur François Gabart, Vela a pour volonté de décarboner le fret international, un secteur responsable de 3 à 5 % des émissions mondiales de CO2 d’après le Fourth IMO GHG Study 2020.
La start-up conçoit et exploite des trimarans-cargos en aluminium, propulsés uniquement par le vent. Cette solution permettrait de réduire de 80 % les émissions par rapport au fret maritime classique et de 99,9 % comparé au fret aérien, selon une étude du cabinet Carbone 4.
Un tour de table qui réunit des fonds environnementaux
Pour financer ce projet, Vela a réuni des partenaires tels que le fonds Révolution Environnementale et Solidaire du Crédit Mutuel Alliance Fédérale, le fonds de décarbonation de la filière maritime de Bpifrance, et la fondation américaine 11th Hour Racing, qui œuvrent pour la préservation des océans. "Cela a pris du temps. Nous sommes dans un contexte économique difficile et nous recherchions des partenaires avec une vision à long terme et une approche internationale", précise Pierre-Arnaud Vallon, CEO de Vela, à Le Figaro.
Sur les 40 millions d'euros levés, 16 millions proviennent d’une augmentation de capital de l’entreprise et 24 millions sont empruntés. Une grande partie de cette somme servira à construire et mettre en service le premier trimaran, son coût exact n'a pas été précisé. Le tour de table permettra également de renforcer l'équipe de Vela, qui passera de 6 personnes (les 5 cofondateurs et un commercial) à une vingtaine, dont 8 marins, d'ici au lancement.
Un premier trimaran attendu pour 2026
Conçu par le cabinet d'architecture navale français VPLP, réputé pour ses voiliers innovants, ce navire de 67 mètres de long et 25 mètres de large sera construit aux Philippines par le groupe australien Austal. Il pourra transporter 500 palettes de marchandises, soit 410 tonnes de charge utile, réparties dans ses sept cales.
Sa propulsion sera assurée par 1 500 m² de voiles, avec une grand-voile à l'arrière et deux voiles à l'avant. Les deux mâts de 53 mètres en fibre de carbone seront fabriqués par Lorima, spécialiste des grands mâts, tandis que la bôme en aluminium, pièce horizontale fixée à la base du mât pour soutenir et orienter la grand-voile, sera fournie par Maréchal. Les systèmes d'enroulement des voiles proviendront de Facnor, et les voiles elles-mêmes de Incidence.
Pour l’électricité et le contrôle de la température dans les espaces de stockage, le navire sera équipé de 300 m² de panneaux solaires et de deux turbines sous-marines (hydrogénérateurs). Grâce à sa vitesse moyenne de 13-14 nœuds (environ 25 km/h) et des outils de prévision météo optimisés, Vela vise des traversées plus rapides que les cargos classiques, de 10 à 15 jours entre la France et New-York.
La start-up prévoit d'agrandir sa flotte avec quatre nouveaux navires d'ici 2027-2028, pour atteindre 5 traversées de l'Atlantique par semaine.
Des premiers clients dans le luxe et les spiritueux
Vela cible les marques de produits à haute valeur ajoutée soucieuses d'améliorer leur bilan carbone, conformément aux accords Scope 3 sur les émissions indirectes, notamment celles liées à la chaîne d'approvisionnement. "Notre solution offre à la fois de la sécurité, de la flexibilité, de la rapidité et une empreinte très réduite, alors que le transport est souvent le poste d'émission le plus important pour les entreprises", soulignait Pierre-Arnaud Vallon, PDG de Vela, à La Tribune en 2023.
Parmi ses clients figurent déjà les champagnes Thiénot, le groupe de mode SMCP (Sandro, Maje, Claudie Pierlot, Fursac), la sellerie de luxe LIM et Planète-Aura, logisticien pour des vins haut de gamme.
Un vent nouveau souffle sur le transport maritime. L'intérêt des marques de luxe pour un fret plus vert a sans doute contribué à la levée de fonds. Reste à voir si ce modèle pourra s'ouvrir à un public plus large ou s'il restera réservé aux produits de luxe et à haute valeur ajoutée.